Mise à jour le 28/12/2022

Le loup, la cigogne et l'anguille : histoires d’animaux en Pays d’Ancenis

Il y a quelques siècles, on croisait dans les campagnes ou dans les rues des villes et des villages du Pays d’Ancenis des animaux qu’on serait bien surpris d’y retrouver de nos jours. À l’heure où tant de menaces pèsent sur la biodiversité, il est intéressant d’évoquer cette faune locale bien plus abondante et diverse qu’aujourd’hui. L’exemple de trois animaux illustre le déclin des espèces, mais aussi leur retour possible.

La peur du loup

En octobre 2021, on a retrouvé à Saint-Brévin le cadavre d’un loup gris, le premier loup signalé en Loire-Atlantique depuis plus d’un siècle. Jusqu’au XIXe siècle, le loup était abondant dans les campagnes du Pays d’Ancenis. Les anciens registres paroissiaux mentionnent parfois ses méfaits. Par exemple à Maumusson, dans les années troublées des guerres de religion, à la fin du XVIe siècle.

À quelques années d’intervalle, deux garçons de 12 ans et un garçon « de douze à treize ans » sont tués et à demi-dévorés par les loups. Mais le loup s’en prend d’abord au bétail. Le livre de comptes d’un propriétaire de Saint-Sulpice-des-Landes mentionne la perte de 18 moutons « mangés par le loup » en 1824 chez un de ses métayers. Les campagnes d’éradication systématique menées au XIXe siècle finissent par faire disparaître le loup. Des primes sont accordées par les autorités. Ainsi, le 11 novembre 1834, le sous-préfet d’Ancenis adresse au préfet « un certificat du Maire de Riaillé, constatant que le sieur Houlard, Pierre de Saint-Sulpice-des-Landes, a pris un loup, dans la forêt d’Ancenis ». La patte antérieure droite et une oreille de l’animal lui ont été présentées à titre de preuve.

La toponymie conserve ici ou là le souvenir du loup :

  • la Fosse au Loup dans la forêt de la Poitevinière,
  • le carrefour du Loup-Pendu à Vallons-de-l’Erdre (Maumusson),
  • la Rotte-au-Loup à Vallons-de-l’Erdre (Saint-Mars-la-Jaille).

Des anguilles par milliers

Si l’anguille se pêche encore en Loire, elle est considérée aujourd’hui comme « en danger critique d’extinction », en raison notamment du braconnage des civelles. Elle était pourtant très abondante autrefois aux abords d’Ancenis, dans le marais de Grée et dans le petit marais qui bordait la ville. Le pont de la Davrays a porté longtemps le nom de « pont des anguilles ». Preuve de cette abondance, un compte de 1515 mentionne l’envoi de 2 000 anguilles salées, provenant des pêcheries du pont de Grée, au château de Rochefort

* où séjournait le seigneur d’Ancenis Claude de Rieux. Elles sont emmenées dans deux portoirs chargés sur un cheval.

La cigogne : une revenante

Elle avait depuis longtemps disparu de notre paysage. Elle était pourtant familière à Ancenis au Moyen-Âge. Il existait une tour de la Cigogne au château d’Ancenis vers 1475. Sans doute des cigognes avaient-elles fait leur nid sur son toit. Dans un compte de la même époque, on voit un couvreur descendre des cigogneaux de leur nid.

Un boucher les emporte à La Ville-au-Chef, une des résidences des sires de Rieux, située à Nozay. À plusieurs reprises, on retrouve dans ces comptes des envois de cigogneaux au seigneur d’Ancenis. Ils finissaient probablement sur sa table. La cigogne, comme le cygne et d’autres grands volatiles, était appréciée sur les tables aristocratiques. Il existait encore à Ancenis au XVIIe siècle un « Carrefour de la Cigogne » et « une maison nommée la Sigogne » rue du Château. La cigogne a fait son retour en Loire-Atlantique en 1989. Elle fait parfois escale dans les prairies humides de la vallée de la Loire, du côté de Loireauxence. Son exemple, comme celui du castor, lui aussi revenu sur les bords du fleuve, montre que des espèces peuvent reprendre possession de leurs anciens habitats quand les conditions redeviennent favorables.

* Rochefort-en-Terre (Morbihan).