Mise à jour le 08/03/2022

Quand les fours à chaux fumaient en Pays d'Ancenis

Voilà un siècle que les derniers fours à chaux se sont éteints dans le Pays d’Ancenis. L’industrie de la fabrication de la chaux - la chaufournerie - y avait connu un essor important, surtout dans la période 1820-1880. Il en reste quelques témoins.

Essentiellement pour le chaulage agricole

Des fours à chaux existaient très anciennement autour d’Ancenis. La chaux servait alors principalement à la construction. Mais l’es-sor de la chaufournerie au XIXe siècle est dû au développement de la pratique du chaulage dans l’agriculture. L’emploi de la chaux sur des sols pauvres entraînait une amélioration spectaculaire des rendements agricoles et permettait aussi de mettre en culture les landes. Dans la région d’Ancenis, cet essor s’est appuyé sur les ressources du sous-sol : le calcaire (la matière première, qui four-nit la chaux par calcination) et le charbon (le combustible).

Des fours ont été construits près des gisements calcaires à Saint-Géréon (aux Brûlis et à l’Écochère) et à La Rouxière (à la Grasserie). Il en reste quelques vestiges. A Saint-Herblon, le four du Bernardeau, au bord de la Loire, pouvait facilement être appro-visionné en pierre calcaire des carrières de Liré. Dans le cas de Mouzeil, la présence d’un gisement de calcaire près des mines de charbon de la Tardivière, a permis la création d’un centre chau-fournier important, avec les sites de Cop-Choux et de Bellevue. À Ingrandes, l’imposant four à chaux de Saint-Augustin était approvisionné par la Loire à partir de la carrière de calcaire de Châteaupanne à Montjean. Pour la fourniture du charbon, les mines de Montrelais (au nord) ou de Montjean (sur la rive gauche de la Loire) n’étaient pas loin. Au Cellier, un four à chaux existe toujours au pied du coteau de Saint-Méen.

Les fours de la région fonctionnaient en général au charbon. Le four est une sorte de tour de pierre massive, en forme de tronc cônique, d’une dizaine de mètres de haut, aux murs très épais. Il est toujours flanqué d’une rampe qui permet d’accéder à son sommet. Là s’ouvre un grand orifice circulaire, le « gueulard » par où les ouvriers déversent en couches alternées les moëllons de calcaire et le charbon. À la base, des ouvertures permettent d’allumer le four et de recueillir la chaux. Le four reste continuellement allumé pendant la saison de production. On voit sortir les flammes et les fumées par le gueulard. Mais il ne fonctionne pas toute l’année. C’est en août-septembre que la demande est la plus forte. Beaucoup de cultivateurs viennent chercher directement leurs barriques de chaux au pied des fours pour la répandre sur leurs terres labourées. Quand les fours sont situés à proximité de la Loire, il est facile d’expédier par des chalands la part de production qui n’est pas vendue sur place.

Beaucoup de fours à chaux ont été démolis après leur abandon. Les derniers témoins méritent d’être sauvegardés, à Vair-sur-Loire (Saint-Herblon), au Cellier (où la commune a racheté le four de Saint-Méen), à Ingrandes-Le Fresne sur Loire, à Ancenis- Saint-Géréon et à Mouzeil. Dans cette commune, en contrebas du dernier four de Cop-Choux, les anciennes carrières, devenues des étangs, forment un site insolite et plein de charme, envahi par la végétation. Ce patrimoine industriel remarquable est complé-mentaire du patrimoine minier, puisque l’exploitation du calcaire et celle du charbon ont souvent fonctionné en symbiose. Un parcours touristique commun pourrait réunir ces témoins des anciennes industries du Pays d’Ancenis.